Contents

La loi n°2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025 (« LF25 ») a été publiée au journal officiel (JORF), après validation par le Conseil Constitutionnel. Le volet fiscalité des entreprises de cette loi s’inscrit dans la droite lignée du projet avorté d’octobre dernier.

Contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises (Article 48)

Nouveauté héritée du projet avorté du gouvernement de Michel Barnier, la loi de finances pour 2025 instaure une contribution exceptionnelle et provisoire sur les bénéfices des grandes entreprises.

Cette nouvelle contribution s’appliquera uniquement au titre du premier exercice clos à compter du 31 décembre 2025, aux entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés et dont le chiffre d’affaires réalisé en France est supérieur ou égal à 1 milliard d’euros, au cours de l’exercice au titre duquel la contribution est due ou de l’exercice précédent.

L’assiette de la contribution sera égale à la moyenne de l’impôt sur les sociétés (« IS ») au titre de l’exercice au cours duquel elle est due et de l’exercice précédent, calculé sur l’ensemble des résultats imposables, avant imputation des réductions et crédits d’impôts et des créances fiscales de toute nature (notamment le « carry-back »).

Le taux de cette contribution exceptionnelle devrait varier en fonction du chiffre d’affaires réalisé par le redevable :

  • Pour les redevables dont le chiffre d’affaires est compris entre 1 milliard d’euros et 3 milliards d’euros, le taux est fixé à 20,6%, (soit, un taux effectif d’IS de 30,975%, incluant la contribution additionnelle de 3,3%)
  • et à  41,2% pour les redevables dont le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à 3 milliards d’euros (soit, un taux effectif d’IS de 36,125% incluant la contribution additionnelle de 3,3%)

Un dispositif de lissage est prévu pour les redevables dépassant de moins de 100 millions d’euros les seuils d’assujettissement à la contribution exceptionnelle.

La contribution ne sera pas déductible.

La contribution fera l’objet d’un versement anticipé à hauteur de 98% de son montant estimé, à la date prévue pour le paiement du dernier acompte d’IS de l’exercice ou de la période d’imposition (au plus tôt, 15 décembre 2025). Le solde sera payé au plus tard à la date prévue pour le versement du solde de l’IS (e.g. 15 mai 2026 pour les exercices clos au 31 décembre 2025).

Report de la suppression de la CVAE et maintien du taux appliqué en 2024 (Article 62)

Comme prévu, la suppression de la CVAE a été reportée à 2030, et l’abaissement progressif des taux suit la trajectoire voulue par le projet du gouvernement précédant.

En l’absence de vote de la LF25 avant le 31 décembre 2024, une contribution complémentaire a été instaurée pour compenser la baisse du taux de la CVAE 2025 votée en 2024, afin de porter le taux maximal effectif de la CVAE 2025 à 0,28% comme prévu par le projet Barnier.

Ainsi, le taux maximal de la CVAE 2025 demeure de 0,19% (pour les entreprises dont le CA > 50M€) auquel s’ajoutera une contribution complémentaire à la CVAE de 47,4% qui sera versée lors du 2nd acompte du 15 septembre 2025 (i.e. acompte au 15 juin 2025 sur la base d’un taux à 0,19%).

Le solde de la CVAE et de la contribution calculé sur la VA 2025 définitive sera liquidé en mai 2026.

Pour la CVAE 2026 et 2027, le taux maximal de 0,28% est maintenu. Ce taux est réduit à 0,19% en 2028 et 0,09% en 2029. La CVAE serait donc, en principe, entièrement supprimée en 2030.

Taxes sur les rachats de titres (Article 95) pour les grandes entreprises

La France se dote également d’une imposition sur les rachats d’action. Elle prendra la forme de deux taxes aux temporalités différentes.

Pour les réductions de capital par annulation de titres réalisées entre le 1er mars 2024 et le 28 février 2025, la LF25 instaure une taxe temporaire calculée de manière globale sur l’ensemble des opérations réalisées depuis mars 2024.

Pour les réductions de capital par annulation de titres réalisées à compter du 1er mars 2025, une nouvelle taxe sera applicable à chaque opération successive.

Les sociétés visées par le texte seront celles ayant leur siège en France et ayant réalisé, au cours du dernier exercice clos, un chiffre d’affaires hors taxes individuel ou consolidé supérieur à 1 milliard d’euros.

Le taux de ces deux taxes est fixé à 8%

Les taxes sur les rachats de titres ne seront pas déductibles de l’IS et devront être déclarées en annexe de la déclaration CA3.

Imposition minimale mondiale « Pilier 2 » (Article 53)

La LF25 complète le dispositif d’imposition minimale mondiale des groupes, dit « Pilier 2 », par la transposition des instructions administratives publiées par l’OCDE et visant à préciser ou clarifier les modalités d’application du dispositif.

Ces dispositions concernent notamment les modalités de détermination de la déduction fondée sur la substance, les règles d’application et de répartition de l’impôt national complémentaire, les modalités d’application des régimes de protection transitoire (Safe Harbours Tests), ou encore la notion de résultat qualifié et d’impôts couverts.

Une règle de solidarité est  également prévue : en cas d’option pour la délégation de paiement de l’article 1679 decies du CGI, l’entité constitutive désignée pour déposer le relevé de liquidation, et procéder au versement de l’impôt complémentaire pour le compte des entités situées en France, sera tenue solidairement au paiement des droits, pénalités et frais accessoires afférents à cet impôt.

Durcissement du dispositif anti-arbitrage de dividendes et consécration de la notion de bénéficiaire effectif (Article 96)

Pour mémoire, le dispositif  anti-arbitrage en vigueur jusqu’à présent soumettait à une retenue à la source tout versement réalisé dans le cadre d’une cession temporaire ou d’une opération assimilée, pendant une période de moins de 45 jours, par un résident fiscal français au profit d’un non-résident (art. 119 bis A du CGI).

La LF25 étend le champ d’application de ce dispositif à tout « transfert de valeur » et supprime le délai de 45 jours.

L’objectif de cet élargissement est de soumettre à retenue à la source en France toutes les opérations de prêt ou de cession temporaire d’action ainsi que les instruments financiers permettant à un résident de transférer la valeur économique d’un dividende à un bénéficiaire non-résident.

Par ailleurs, en réaction à la jurisprudence du Conseil d’Etat du 8/12/2023, la LF25 consacre la notion de « bénéficiaire effectif » à l’article 119 bis, 2 du CGI, permettant l’application d’une retenue à la source, par principe, lorsque le bénéficiaire effectif des dividendes est situé à l’étranger et que le bénéficiaire apparent est résident de France.

Enfin, la LF25 prévoit qu’à compter du 1er janvier 2026, la retenue à la source de droit interne (25%) devrait être appliquée aux dividendes et revenus assimilés de source française versés à un bénéficiaire résident d’un Etat ayant signé une convention fiscale qui ne prévoit pas ou exonère de retenue à la source ces produits. Par la suite, le bénéficiaire pourrait  obtenir le remboursement de la retenue à la source, sous réserve de démontrer qu’il respecte les conditions fixées par ladite convention. Toutefois, ce dernier texte n’étant pas d’application immédiate, nous attendrons les précisions de l’administration fiscale pour connaitre sa portée exacte et confirmer notamment qu’il ne doit pas être lu comme s’appliquant à l’ensemble des dividendes distribués à des actionnaires étrangers lorsque ceux-ci sont exonérés de retenue à la source en application d’une convention fiscale.

Aménagements consécutifs à l’ordonnance du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions (Article 65)

La loi tire aussi les conséquences de l’ordonnance n°2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions et apports partiels d’actifs qui avait pour objectif de faciliter la réalisation de ces opérations au sein de l'espace européen.

Elle introduisait notamment un nouveau cas de fusion ou scission sans échange de titres et une nouvelle définition de l’apport partiel d’actifs.

La LF25 procède ainsi aux ajustements techniques permettant à ces nouvelles opérations de bénéficier du régime fiscal de faveur des fusions (article 210-0 A CGI).

Les fusions et scissions dont le projet a été déposé au greffe à compter du 1er juillet 2023 sont éligibles au nouveau régime (application rétroactive).

Taxe sur les transactions financières (Article 26 quater)

Le taux de la taxe sur les transactions financières de l’article 235 ter ZD du CGI passe de 0,3% à 0,4% à compter des transactions réalisées le 1er jour du 2ème mois suivant la promulgation de la LF25.

Transposition de la directive DAC8 (Article 54)

Il est également procédé à la transposition de la directive européenne n°2023/2226 (UE) relative à l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal relativement aux actifs numériques (directive DAC8).

À l’image des précédentes directives DAC, ce texte vise à instaurer un échange automatique d’information sur les cryptoactifs par la mise en place d’obligations déclaratives à la charge des prestataires de services sur cryptoactifs.

Ces prestataires auront l’obligation de collecter et déclarer les informations permettant d’identifier les transactions portant sur ces actifs, les comptes utilisés pour les détenir et leurs titulaires.

Le non-respect de cette obligation sera sanctionné d’une pénalité de 15€ par transaction non déclarée, déclarée tardivement ou par inexactitude dans la limite de 2m€ par prestataire de services et par an.

Cette obligation déclarative concernera  les transactions réalisées à compter 1er janvier 2026.

Plafonnement exceptionnel du montant des déficits reportables (Article 97)

Les entreprises dont le déficit constaté au titre des 3 exercices consécutifs clos en 2023, 2024 et 2025, excède 2,5 milliards d’euros verront, au titre du 1er exercice clos à compter du 31 décembre 2025, le montant de leurs déficits reportables plafonné à 2,5 milliards d’euros.

Pour les entreprises membres d’un groupe d’intégration fiscale, ce seuil de 2,5 milliards sera apprécié individuellement.

Réduction de l’assiette du crédit d’impôt recherche (articles 55 et 58)

La LF25 procède à certains aménagements concernant l’assiette du crédit d’impôt recherche (CIR) :

  • Baisse des dépenses de fonctionnement en réduisant le taux forfaitaire appliqué aux dépenses de personnel éligibles qui passe de 43% à 40%
  • Exclusion de l’assiette du CIR : les frais de prise et de maintenance de brevets et de certificats d’obtention végétale, les frais de défense de brevets et de certificats d’obtention végétale, les dotations aux amortissements des brevets et de certificats d’obtention végétale et enfin les dépenses de veille technologique.
  • Suppression des avantages liés à l’embauche de jeunes docteurs (200% des dépenses de personnel)

Les exclusions ou réductions s’appliqueront aux dépenses exposées à compter du lendemain de la promulgation de la LF25.

Enfin, en réaction à la décision du Conseil d’Etat du 12/07/2023, la LF25 vient préciser la notion de « subventions publiques », admises en déduction des bases de calcul du CIR. Ainsi, l’article 244 quater B du CGI intègrera désormais la définition de ces subventions, lesquelles sont qualifiées « d’aides versées par les personnes morales de droit public ou par les personnes morales de droit privé chargées d’une mission de service public ».

Prorogation du crédit d’impôt innovation (CII) et du crédit d’impôt collection (CIC)

La LF25 proroge ces dispositifs jusqu’au 31 décembre 2027.

Conformément au projet initial, le taux du CII est abaissé de 30% à 20%.

Loi de Finances pour 2025

Loi de Finances pour 2025

Télécharger l’alerte [426 kb]