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La défense de vos droits : détection des atteintes, précontentieux et contentieux
La France impose trois exigences cruciales en matière de prix de transfert : la documentation (A), la déclaration annuelle (B) et la déclaration pays-par-pays (CbCR) (C). Ces obligations ont été mises en place pour prévenir les transferts indirects de bénéfices à l’étranger entre sociétés d’un même groupe et réduire l’optimisation fiscale agressive. L’appréciation des champs d’application s'avère complexe, rendant difficile l’identification des obligations pesant sur les contribuables en la matière.
A – Documentation
La taille des entreprises ou de celles composant le groupe auquel elles appartiennent définit le niveau d’obligation. Indépendamment de l’obligation, la rédaction d’une documentation est fortement conseillée pour toutes les entreprises.
Documentation obligatoire [Articles L. 13 AA / L.13 AB du Livre des Procédures Fiscales (LPF)]
L’obligation de documentation des prix de transfert en France s’applique à tous les contribuables français (y.c. les établissements stables d'entreprises étrangères) :
- Réalisant un chiffre d’affaires annuel hors taxes ou détenant un actif brut figurant au bilan d’au moins 400 millions d’euros (150 millions d’euros pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2024) ; ou
- Détenant à la clôture de l'exercice, directement ou indirectement, plus de la moitié du capital ou des droits de vote d'une entité juridique répondant à l’une des conditions définies au a) ci-dessus ; ou
- Dont plus de la moitié du capital ou des droits de vote appartient directement ou indirectement, à la date de clôture de l’exercice, à une entité juridique répondant à la condition définie au point a) ci-dessus ; ou
- Membre d’un groupe d’intégration fiscale, lorsque ce groupe comporte au moins une entité juridique répondant à l’une des conditions ci-dessus (c'est-à-dire a, b ou c).
Ces seuils doivent être appréciés sur la base d'états financiers statutaires.
Depuis 2018, les exigences françaises sont alignées sur les recommandations de l’Action 13 du plan BEPS de l’OCDE (Fichier Principal et Fichier Local). Les transactions à documenter dans le Fichier Local sont celles entre l’entité française et une ou plusieurs entreprises associées dont le montant agrégé par catégorie excède 100 000 € au titre de l’exercice.
Cette documentation doit être disponible le premier jour du contrôle fiscal ou, à défaut, dans les 30 jours d’une mise en demeure. Les entités françaises concernées ne remplissant pas leur obligation sont soumises à une pénalité, par exercice, à hauteur du montant le plus élevé entre (i) 0,5 % du montant des transactions qui ont été omises ou insuffisamment documentées ou (ii) 5 % des rectifications afférentes à ces mêmes transactions, avec un minimum de 50 000 € par exercice.
La Loi de finances pour 2024 rend désormais opposable au contribuable cette documentation prix de transfert et créé une présomption de transfert indirect de bénéfices, lorsque la méthode de détermination des prix de transfert diffère de la méthode présentée dans la documentation. Le contribuable peut combattre cette présomption par tout moyen.
« Documentation » sous conditions [Article L. 13 B du LPF]
Pour les autres contribuables français, les inspecteurs des impôts sont autorisés à demander, sous conditions, des informations concernant la politique de prix de transfert appliquée.
B - DECLARATION ANNUELLE
L’article 223 quinquies B du Code Général des Impôts (CGI) prévoit une obligation de déclaration des prix de transfert.
Cette déclaration (Cerfa 2257-SD) doit être déposée électroniquement chaque année par certains contribuables français dans les six mois du dépôt de la liasse fiscale. Cette obligation s'applique aux contribuables français dont le chiffre d'affaires ou l’actif brut est supérieur ou égal à 50 millions d’euros, ainsi qu’à ceux qui détiennent une filiale ou qui sont détenus par des actionnaires directs ou indirects (détention en capital ou en droits de vote supérieure ou égale à 50%) atteignant ces seuils. Ces seuils doivent également être appréciés sur une base statuaire.
La déclaration doit notamment inclure une description des méthodes de prix de transfert utilisées, des informations relatives à l’exploitation et à la localisation des actifs incorporels clés, ainsi que les montants de transactions intragroupe transfrontalières accusés par la comptabilité sociale ensemble avec la juridiction d’établissement de la contrepartie.
Le non-dépôt de la déclaration ainsi que les omissions et inexactitudes, sont sanctionnés comme suit :
- Le défaut de dépôt dans les délais prescrits entraîne l’application d’une amende de 150 € ;
- Sauf cas de force majeure, les omissions ou inexactitudes donnent lieu à une amende de 15 € par omission ou inexactitude,
sans que le total des amendes puisse être inférieur à 60 € ou supérieur à 10 000 €.
Ces sanctions ne s'appliquent pas en cas de première infraction commise pendant l’année civile en cours et les trois années civiles précédentes, lorsque le contribuable concerné a remédié à l’infraction, soit spontanément, soit dans les 30 jours d’une demande de l’administration fiscale.
C - DÉCLARATION PAYS-PAR-PAYS
L’obligation de déclaration pays-par-pays ou Country-by-Country Reporting (“CbCR”) est définie à l’article 223 quinquies C du CGI.
Les sociétés françaises doivent déclarer (Cerfa 2258-SD), dans les 12 mois suivant la clôture de l’exercice, leurs activités, ainsi que leurs bénéfices pays par pays et divers agrégats économiques, comptables et fiscaux.
Les sociétés françaises soumises à cette obligation sont celles :
- Etablissant des comptes consolidés ; et
- Détenant ou contrôlant, directement ou indirectement, une ou plusieurs entités juridiques établies hors de France ou ayant des succursales à l’étranger ;
- Réalisant un chiffre d'affaires annuel consolidé d'au moins 750 millions d’euros ; et
- N’étant pas détenues par une ou plusieurs entités juridiques situées en France et soumises à cette obligation de déclaration pays par pays, ou établies hors de France et soumises à une obligation de déclaration similaire en vertu d’une législation étrangère.
Les entreprises qui ne se conforment pas à cette obligation sont passibles d'une amende ne pouvant excéder 100 000 €.
En outre, sous certaines conditions, les contribuables français peuvent être soumis à une obligation de notification dans la liasse fiscale (formulaire 2065-SD).
Cette déclaration ne doit pas être confondue avec le CbCR public applicable en France pour les exercices ouverts à compter du 22 juin 2024 et dont le contenu est sensiblement comparable au CbCR (2258-SD). Les commissaires aux comptes devront indiquer si la société est soumise à ce CbCR public et si tel est le cas, attester que le rapport relatif à l’impôt sur les bénéficies a été publié et mis à disposition du public pour l’exercice précédant celui pour lequel les comptes sont certifiés.